Ce vendredi 25 novembre 2016, isala a contribué activement à célébrer la journée internationale pour l’élimination des violences contre les femmes. Nous étions invité-e-s à présenter notre action d’accompagnement lors du colloque ayant lieu à Strasbourg sur le thème ‘Prostitution et santé’.
Organisé par le CIFDD67, le Mouvement du Nid, Pénélope, l’Agence Régionale de Santé et la Préfecture de la région Grand Est, l’évènement visait à mieux comprendre les liens entre prostitution et santé, et à échanger expériences et actions avec les pays voisins (Belgique et Allemagne).
Est-ce que la prostitution est une atteinte à la santé des personnes ? C’est la question fondamentale de la journée, qui, selon la réponse qu’on lui donne, amène à la mise en place de politiques publiques très différentes. Si la prostitution atteint à la santé globale des personnes, il nous faut donc viser son abolition afin de protéger chacun-e, décision politique qui a été prise en Suède, en Norvège, en Islande, en Irlande du Nord et cette année en France. Si l’on considère que la prostitution ne pose pas de problème sur la santé globale des personnes, il s’agit alors de réduire les risques et d’organiser la prostitution, choix qui a été pris en Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas. « Selon la définition de l’Organisation Mondiale de la Santé, selon laquelle la santé est un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social, il faut vivre hors prostitution pour vivre en bonne santé », a expliqué Grégoire Théry, directeur exécutif de CAP International.
Isabelle Collot, du Mouvement du Nid Grand Est, a rappelé les principaux obstacles rencontrés par les personnes prostitées pour accéder aux soins de santé : la pression des proxénètes et de l’argent (donc le système prostitueur), les clients eux-mêmes, les questions d’identité sexuelle ou de statut légal, le regard de la société (peur de ne pas être accueillie et de ne pas être bien soignée). Elle a rappelé qu’accompagner les personnes, c’est s’investir dans le temps, être là au bon moment à la demande des personnes. Comment se protéger quand on n’a jamais été protégée ?
La survivante Laurence Noëlle a témoigné de son histoire, et rappelé l’ensemble des impacts de la prostitution sur l’être humain : viols, traumatismes, dissociation, disfonctionnements du corps, maladies, dépression permanente, alcool et drogue, etc. Elle a insisté sur la difficulté à se reconstruire au niveau de la santé psychique, et répété que la prostitution st une violence et une souffrance. « Je ne peux pas me reconstruire s’il n’y a personne pour m’écouter. Tout ce que je ne dis pas s’imprime, me réprime et me supprime ».
Le gynécologue Wolfgang Heide et la psychothérapeute Ingeborg Kraus ont présenté la situation en Allemagne, et les conséquences visibles et invisibles, sur la santé des femmes, de la dépénalisation d proxénétisme. Emprise des proxénètes qui veulent casser la volonté des personnes, exploitation dans les bordels, où elles sont vendues en pack pour 50 euros avec de la bière et une saucisse, privées de sommeil, et vulnérable à la violence des clients… Survivant grâce à des analgésiques et antidépresseurs, la majorité des personnes prostituées se dissocient d’elle-même pour survivre.
De son côté, isala a pu expliquer le contexte belge, la réalité de la prostitution à Bruxelles, les questions de santé qui se posent (de manière visible ou invisible) et les défis pour l’accompagnement des personnes. Si les plans d’action fédéral et intra-francophone qualifient depuis peu la prostitution de violence sexuelle, le manque de volonté politique de reconnaître l’impact de la prostitution sur la santé des femmes se traduit sur le terrain : par une absence de services qui prennent en compte la santé globale des personnes prostituées et remettent en cause le système prostitutionnel lui-même, pas seulement ses conditions.
Le colloque s’est terminé par une table-ronde sur l’importance de la prévention, avec une intervention inspirante de Nicole Greib, du Planning familial 67, et les mots de conclusions du préfet.
Les actes de cette journée seront prochainement disponibles. La présidente d’isala, Pierrette Pape, a été interviewée par la chaîne Alsace20 (voir la vidéo du Journal Télévisé du 25 novembre 2016 ci-dessous).
L’association isala se réjouit d’avoir pu contribuer à ce colloque européen, et rapporte de nombreuses réflexions avec elle à Bruxelles.
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